Les Signares : symboles d’élégance et de pouvoir à Saint-Louis du Sénégal




À Saint-Louis, au XVIIIe siècle, une femme pouvait arrêter le temps par sa seule présence. Drapée dans un pagne de soie, parée d’or et de perles, suivie de musiciens et de griots, elle avançait avec grâce et assurance.
C’était une Signare. Ces femmes issues de l’aristocratie wolof, associées aux commerçants et administrateurs européens, ont marqué l’histoire du Sénégal par leur beauté, leur raffinement et leur rôle économique et social.
Origine des Signares : entre Afrique et Europe
L’histoire des Signares commence à la fin du XVe siècle avec l’arrivée des Portugais sur les côtes ouest-africaines.
À Saint-Louis et à Gorée, les unions entre Européens et femmes africaines nobles donnaient naissance à un métissage unique.
Ce type d’union, appelé « mariage à la mode du pays », liait un négociant ou un officier européen à une femme africaine instruite, parlant français et familière des usages européens. Ces alliances, d’abord discrètes, devinrent au fil du temps des arrangements sociaux reconnus. Elles permirent à ces femmes d’acquérir un statut privilégié et de transmettre richesses et héritages à leurs enfants.
Le rôle des Signares dans la société coloniale
Au XVIIIe siècle, les Signares occupaient une place centrale dans la vie de Saint-Louis et de Gorée.
Elles formaient une véritable aristocratie métisse, influente dans le commerce, la politique locale et les échanges culturels.
Leurs unions stratégiques avec des Européens leur donnaient accès à :
• des biens de luxe importés,
• un réseau commercial puissant,
• une influence politique locale.
Elles étaient également connues pour leur élégance légendaire : chemises fines brodées, pagnes colorés, bijoux d’or finement travaillés par les orfèvres maures.
Beauté et raffinement : l’art de séduire
Les Signares faisaient de l’apparence un langage social.
Elles portaient des colliers en cascade, des bracelets massifs, des boucles d’oreilles imposantes. Leur maquillage, à base de khôl et de pigments naturels, accentuait la profondeur de leur regard. Elles se déplaçaient rarement seules : esclaves parées de perles et de corail, griots, porteurs de flambeaux… tout un cortège qui témoignait de leur prestige.
Les Mbotaye : cercles d’influence féminins
Les Signares ne se contentaient pas de briller par leur beauté. Elles savaient aussi tisser des réseaux puissants.
Elles se regroupaient en mbotaye, sociétés féminines où elles organisaient bals, réceptions et rencontres stratégiques. Ces cercles permettaient de renforcer leur position dans la société et d’assurer l’avenir de leurs enfants métis, souvent éduqués à l’européenne.
Un héritage toujours vivant
L’âge d’or des Signares atteint son apogée dans les années 1780. Aujourd’hui, si cette élite métisse a disparu en tant que groupe social, son influence perdure dans :
• la culture métisse de Saint-Louis,
• les traditions vestimentaires,
• la mémoire collective sénégalaise.
Les Signares incarnent encore aujourd’hui l’élégance, la stratégie sociale et le raffinement qui ont façonné l’histoire de Saint-Louis et de Gorée.